Les vacances de Monsieur Hulot

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Quoi de mieux pour souhaiter au revoir à l’été qu’un film qui nous rappelle à quel point les vacances ne nous sont vraiment pas de tout repos? Avec le vent qui souffle à tous coups, les marées qui nous éclaboussent ou un drôle d’escogriffe en imperméable qui joue de la musique à plein volume alors qu’on essaye de se coucher, on se prendrait bien des vacances de vacances!


Monsieur Hulot est à Jacques Tati ce qu’est Charlot à Charlie Chaplin. C’est un personnage du cinéma muet transposé au cinéma sonore. Un mime parlant. Il s’incarne à l'écran comme un sorte d’anachronisme ambulant, avec son “gentle slapstick” et son langage corporel tout droit emprunté au cinéma des années 20. Burlesque, maladroit, attachant, ce sont tous des qualificatifs qui conviendraient au personnage. Maintenant, dans son film introductif, voyons comment se débrouille le personnage alors qu’il part en vacances dans une petite localité estivale du Grand-Ouest Français…


À L’image de la voiture de Monsieur Hulot, le film semble avancer à une vitesse de colimaçon. L’approche se veut plus atmosphérique, contemplative. Il n’y a pas vraiment d’intrigue tangible et les dialogues sont brefs et ne servent vraiment qu’à mettre l’habillage au décor. Il faut plutôt s’imaginer une série de tableaux quelque peu disjoints qui laissent place à des gags visuels et une satire légère, sans mesquineries, de la société de consommation des années 50. Quelques cas remarquables: le gag du pot de peinture entraîné par la marée qui part et revient pile au moment où Monsieur Hulot doit y tremper son pinceau, la partie de tennis ou bien encore le tintamarre causé par le phonographe à l'hôtel… Peut-être ne faut-il pas s’attendre à rire aux éclats, les moments qui m’ont fait décocher plus qu’un sourire sont épars et que dans l’optique d’une comédie le film échoue à certains égards, mais l'œuvre compense plus qu’assez dans son charme et sa subtilité. On pourrait aussi reprocher le manque de dimensionnalité accordé aux personnages, qui sont malgré tout sympathiques et dépeints avec un certain naturalisme. Même Hulot pâtira de ce manque de profondeur. Parmi la gamme de visages introduits dans le film, j'aimais beaucoup l'intellectuel de gauche qui s'efforçait à draguer (en vain) la fille blonde dans le café ou la vieille dame Britannique très enthousiaste et un peu naïve qui supervisait le match de tennis. Ce sont des portraits de personnes composites, certes, mais ils sont mémorables.


Enfin, pour conclure, la plupart des reproches que j’adresse au film sont pratiquement inexistants dans la suite, qui est probablement le magnum-opus du réalisateur, “Mon Oncle”. Je dois avouer que je l’ai même trouvé assez émouvant et que j’en ai versé une larme vers la fin. L'image de Hulot comme un héros absurde, hors de son temps, y est encore plus apparente.
Je reviendrai probablement la semaine prochaine vous parler d’un de mes films préférés (et par extension, l’un de mes réalisateurs préférés, Shohei Imamura) la version de 1983 de “La Ballade de Narayama”. Soyez à l'affût!

Adib Alouta

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